1er septembre 2014 : levé de soleil depuis le mont Perdu
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dimanche 6 septembre 2009

05-09-2009 ARETE NORD OUEST DU GABIETOU ORIENTAL, TAILLON, DOIGT DE LA FAUSSE BRECHE

Samedi 05 septembre 2009

GABIETOU ORIENTAL
PAR L'ARETE NORD OUEST (AD)
TAILLON
DOIGT DE LA FAUSSE BRECHE (AD-)
Avec Cyril Renailler
Vendredi 04 septembre:
21h30, arrivée tardive à Gavarnie, nous montons au col des Tentes dans la purée de pois nocturne, installation de la tente sous la bruine et au lit en vitesse. La nuit est ponctuée jusqu'assez tard, par l'arrivée d'espagnols qui se croient à la maison. Résultat, nuit bien peu reposante pour moi, Cyril comme d'habitude à peinne allongé s'endort comme une masse.
Samedi 05 septembre:
6h réveil, 7h départ. Nous allons au Gabiétou, mais par quel chemin? Au port de Boucharo, en empruntant le sentier de la brèche de Roland, l'arête ouest (itinéraire 207 du guide Ollivier Cauteret-Vignemale-Gavarnie réédition 1996) est éliminée. Nous partons au pied de la face nord du Taillon, direction la corniche Passet (itinéraire 204) qui s'élève vers le glacier des Gabiétou. Puis, finalement, éliminant la vire et la face nord du Gabiétou (it. 205), nous repartons plein ouest dans le pierrier pour aller à la brèche des Tourettes au pied de l'arête nord ouest (it.206). Là au moins, nous n'avons plus à chercher ou aller : il n'y a plus le choix.

En long ou en large...

Fraîche et rapide montée au dessus d'une mer de nuage somptueuse sous l'éclairage matinal. Nous progressons sur un névé dur ou nous sortons piolets et crampons, puis un bref couloir croulant et une petite dentelure nous dépose à la brèche.

Du grand spectacle ce matin à Gavarnie... L'arête nord ouest du Gabiétou oriental
A gauche du sommet des Tourettes, la brèche et le départ de l'arête

Cyril arrive à la brèche

Encordement. Nous sommes partis avec un seul brin de la corde à double (bien remise du couloir de la Fourche à l'Ossau après son lavage en machine, voir message de la semaine dernière), donc les longueurs ferons 30m maxi aujourd'hui.
9h passées, un départ déversant en mauvais rocher (IV) finit de me réveiller, avant de continuer à m'élever au dessus de la brèche. Le rocher est plus qu'à surveiller. Relais sur friends. Je continue, traversée sur la gauche, rocher toujours aussi peu sûr, j'arrive en bout de corde au milieu d'une dalle. Ni sangle, ni friends, ni coinceurs ne peuvent servir, mais aujourd'hui...comme j'ai prévu de grimper sur le Doigt, et que je ne sais pas s'il y a un relais pour en redescendre, j'ai jeté mon marteau et trois clous dans le sac. Ca tombe bien, les voilà qui trouvent leur utilité plus tôt que prévu. Relais sur deux pitons (moyennement enfoncés histoire de les récupérer). Après, Cyril passe devant, et nous continuons en corde tendue sur un terrain moins raide, plus franc, agrémenté d'armoises laineuses (génépi).

Dans le terrain à génépi

Nous revenons vers l'arête, puis repartons sur la gauche. Je repasse devant, rochers plus raides à nouveau, mais bien plus sains, quelques jolis pas, avant de rejoindre sur le flan oriental une succession de vires.

Sur l'arête

C'est un jeu amusant que de les suivre, elles strient la face, sont peu raides, mais versent légèrement sur la face. Elles sont recouvertes de cailloutis peu sûrs, mais les rochers qui les bordent offrent de bonnes prises. Tantôt en ascendance vers la droite pour revenir vers le fil de l'arête, tantôt en ascendance vers la gauche, nous nous élevons ainsi, quasiment tout le temps en corde tendue.
Cyril dans les vires ascendantes du Gabiétou
Nous rejoignons une brèche, Cyril repart devant, surmonte un joli passage en adhérence, passe une nervure, avant de rejoindre une nouvelle vire à flanc. Je la remonte ensuite, elle aboutit à une brèche dont l'accès est défendu par une petite cheminée déversée. Joli passage.

Dans la partie finale sur l'arête nord ouest du Gabiétou occidental

Au delà, par des rochers faciles et un pas de ci de là, nous parvenons aux anneaux à la cime du Gabiétou oriental (13h). Accolade, puis nous posons les sacs et faisons l'aller-retour au sommet occidental, plus élevé. A 13h30, pause repas avant de descendre brièvement sur le col des Gabiétou (15h). 35 mn de remontée nous déposent au sommet du Taillon. Nous ne nous y arrêtons pas, et 15mn après, nous sommes au pied du Doigt de la Fausse Brèche.

Du Gabiétou occidental, vue sur le sommet oriental et le Taillon

Depuis un jour funeste de juillet 1992, ce n'est jamais sans une certaine émotion que je repasse dans les parages. Ce jour là, fuyant le sommet du Taillon sous un orage aussi soudain que violent, à quelques mètres de nous, un jeune allemand de 18 ans mourrait foudroyé. Johannes Schmidt avec d'autres personnes dont sa mère, son frère et sa soeur, s'était réfugié dans la petite grotte s'ouvrant au pied du versant nord du Doigt. La foudre, en le frappant, avait fait exploser le sommet, avant de suivre probablement une fissure interne dans la roche du monolithe, de traverser la grotte et d'en rejaillir en boule de feu se perdant dans le néant. Quelques instants avant le drame, bien conscient du risque potentiel que représentait cet abri -qui pouvait cependant avoir une allure providentielle dans cette furie -, nous nous étions, avec le groupe de jeunes que nous accompagnions alors, réfugiés un peu plus loin, sous les premiers remparts du pic Bazillac.
Les parents de Johannes Schmidt étaient revenus à Gavarnie pour fêter les 18 ans de leur fils ainé, qu'ils avaient conçus lors d'un séjour sur les lieux. C'est dans ces même lieux qu'ils le perdirent à jamais."La brèche de Roland" avec Mathieu Almaric, le film des frères Larrieu, réalisateurs tarbais, est, paraît-il inspiré de cette histoire. Une plaque commémorative a été scéllée au pied du Doigt, sur la gauche de la grotte. J'avais 21 ans, j'ai mis longtemps avant de revenir au Taillon...

In Memorian Johannes Scmidt
Les chaussons d'escalade sont restés accrochés au sac sur la nord ouest du Gabiétou, je les enfile avant de m'élever dans la cheminée verticale à gauche de la grotte. 25m et quelques friends plus haut, j'arrive au sommet. Petite escalade amusante AD-, rocher médiocre dit le guide Ollivier (it. 214). Mais finalement, le rocher est quand même acceptable (III+). Il y a un relais équipé, mais les sangles me semblent dater un peu, je préfère en passer une en plus autour d'un gros bloc posé sur le replat sommital. Petit tour au sommet, pause photo, puis descente en moulinette.
En 1887, pendant que François Bernat-Salles dormait "philosophiquement" au pied du Doigt, Henri Brulle, Jean Bazillac et Célestin Passet avaient quant à eux employé 3h à en réussir la première ascension, par ce même itinéraire. Après cela Henry Russell s'exclamait avec malice, en désignant son ami Brulle : "Il a monté le Doigt de la Fausse Brèche, il a monté le Doigt de la Fausse Brèche!" (voir Brulle Henri, Ascensions, Sirius 1986, II, p.16).

Au sommet du Doigt, devant le pic Bazillac. Sur la gauche, la cheminée d'ascension.

Cyril part à son tour, mais la corde ne coulisse pas, on bataille pas pendant des heures, finalement je tends la corde, puis il monte avec un noeud de Prussik, récupère la sangle et redescend en rappel sur le relais.

Cyril dans la cheminée du Doigt

17h sonnantes, sacs bouclés, on file au triple galop, passons à la brèche de Roland et au refuge des Sarradets sans nous arrêter. A 18h10, nous sommes revenus au col des Tentes. C'est qu'on est attendu à la grange de Holle pour 19h. Nous arrivons même avant, ça change du we dernier...

mercredi 2 septembre 2009

30-08-2009 PETIT PIC DU MIDI D'OSSAU ARETE DE PEYREGET ET COULOIR DE LA FOURCHE

AU PETIT PIC DU MIDI D'OSSAU
PAR L'ARETE DE PEYREGET (ADinf)
ET
REDESCENTE
PAR LE COULOIR DE LA FOURCHE
(Abo, plus jamais ça!)
Dimanche 30 août 2009 avec Cyril Renailler

Dernière pente de neige déposant en haut de la Grande Raillère
Cyril sort de la rimaye de base
Auto-photo dans la rimaye
Pré-lavage des bonhommes
et de la corde!
Rappel 5, Cyril prends le frais...
Rappel 4, que du bonheur
Rappel 3 dans le couloir
Rappel 2 sous la Fourche
Rappel pour rejoindre la Fourche
Cyril au sommet
Le profil de l'éperon NO de la pointe de France
Ombre de Jean-Pierre au pied de la face nord, lac de Bious-Artigues
Cyril à la sortie des brèves difficultés de l'arête de Peyreget
Lever de soleil sur les sommets de la vallée d'Aspe
Pointes d'Aragon et Jean Santé
Petit et Grand pic du Midi d'Ossau (Jean-Pierre), pointe d'Aragon
Jean, le Grand pic du Midi d'Ossau, au premières lueurs
Pierre, le Petit pic du Midi d'Ossau et l'arête de Peyreget


Nous n'avons pas poursuivis jusqu'à Jean hier, mais nous irons jusqu'à Pierre aujourd'hui.
Dans les familles ossaloises, il était autrefois de tradition de prénommer le premier garçon (l'aïnat, le plus grand), Jean, puis le second, Pierre. C'est de cette coutume ancestrale dont est issue l'appelation que tous les pyrénéistes utilisent pour désigner, avec tout l'attachement et même l'affection qu'ils lui vouent, le pic du Midi d'Ossau: Jean-Pierre.

Levé plus matinal encore qu'hier, car à 17h, Cyril doit être au casino des Eaux-Bonnes pour le démontage de sa belle expo photo.

8h15, 35mn viennent de nous déposer au col de Peyreget mais nous y passons 3/4 d'h à regarder le soleil enflammer l'Ossau.

9h, grimpette sur des pentes herbeuses avant de récupérer l'arête, nous suivons les cairns, qui évitent tous les gendarmes. Finalement, seul un petit passage sur la fin dans une cheminée nécessite un peu d'attention (III), ainsi que les quelques dizaines de mètres qui suivent. Au dessus, terrasse avec carrément un spit pour assurer (il est vraiment en trop celui-là, faut l'virer).

11h15, nous voilà assis au sommet de Pierre, nous passons là un bon moment à regarder ceux qui arrivent sur Jean, ou qui s'engagent dans la traversée.
11h45, on repart, cheminée, puis rappel pour rejoindre la Fourche. Quelques pieds de renoncule des glaciers et de génépi avant d'y parvenir.
J'avais un souvenir de 10 ans du couloir de la Fourche. Je l'avais gravit alors en hiver, seul, faisant l'aller retour au petit Pic...et mon souvenir n'était pas marqué de difficulté particulière.

Entre relais perchés à 15m sur des murs lisses, entre la pieraille, le névé en bas (20 m d'épaisseur) -une fois dessus, une fois dessous -, la rimaye, la caillasse ne demandant qu'à descendre plus bas, l'eau, les rappels déversant, et tout le reste, il est 16h30 lorsque nous nous arêtons pour manger au pied du couloir, 350m plus bas, enfin à l'ombre sur une terasse herbeuse.

Nous, autant que nos sacs, habits, la pauvre corde, bref bonhommes et matériels sont dans un état de saleté pitoyable. Bien imbibés de terre et d'eau.

Descente de la Grande Raillère au galop-dérapé, canette au refuge, mais ça s'fait pas en été ça! me dit Karine, pliage du bivouac, 45mn du refuge à la voiture, brin de toilette, arrivée aux Eaux-Bonnes à 19h20.
Pour ceux qui ne sont pas convaincus que la physionomie de la montagne pyrénéenne change radicalement entre hiver et été, faites (ou plutôt ne faites pas) comme moi : le couloir de la Fourche en hiver (PD+, belle pente de neige uniforme, assez large, avec un court ressaut à 50°, même les surfeurs le montent pour le redescendre en planche), et descendez le en été (j'insiste, faut pas le faire, c'est dangereux).
On a eu Pierre? Il nous a bien eu lui aussi.
Résultat, lavage intégral de la corde - et du reste - en rentrant sous la douche...froide.

lundi 31 août 2009

29-08-2009 POINTE JEAN SANTE (OSSAU) - COULOIR POMBIE-PEYREGET (Dinf)

Pointe et brèche Jean Santé, couloir Pombie-Peyreget
Pointes Jean Santé et d'Aragon
Matin brumeux
Cyril arrive à R2
Beau perchoir pour admirer le paysage
Moi aussi je fais la pause photo
Sous le grand suplomb du couloir
Cyril arrive à R4
A la sortie des vires déversées
Cyril dans L5 sous le grand bloc
La pointe d'Aragon
Au sommet Plein gaz sur Pombie
La Grande Raillère vue du sommet
Plaque commémorative et guides (Ollivier, Dupouey, Passages Pyrénéens)
Cyril dans la brèche Jean Santé
Rappel dans le couloir
En rappel au dessus des Vires


A LA POINTE JEAN SANTE
PAR LE COULOIR

POMBIE-PEYREGET

(Dinf)

Samedi 29 août 2009 avec Cyril Renailler

Au dessus de la muraille cuivrée de Pombie, la quatrième pointe de Jean-Pierre me faisait rêver depuis longtemps. Lieu de haute lutte avec les parois parmi les plus difficiles de l'Ossau et des Pyrénées, depuis plus de 80 ans, la pointe Jean Santé a opposé sur ses flancs, éperons, faces, gendarmes, aiguillettes et couloirs, de redoutables défenses aux plus grands pyrénéistes d'avant garde.

Jean Santé bien sûr, son premier vainqueur, Robert Ollivier, Marcel Cames, François Cazalet, Roger Mailly, Marcel Jolly, Joseph Simpson, André Brives, André Armengaud, Jean et Pierre Ravier, Marcel Bernos, Jacques Soubis, Hervé Butel, Jean-Louis Pérès, Louis Audoubert, Robert Mizrahi, Jean Oscaby, Raymond Despiau, Francis Tomas, Rainier Munsch, Dominique Julien, Bernard Prat, Michel Fabbro, Tony Bedel, Michel Boulang, Jean-Claude Coste, Serge Castéran, Jérôme Thinières, Rémi Thivel...pour ne citer qu'eux (et j'en oublie beaucoup...), chacun à leur manière et dans une progression d'ensemble pouvant parfaitement illustrer l'évolution du pyrénéisme de difficulté - tant estival qu'hivernal - sont venus écrire tour à tour une page dans l'histoire de la conquête de cette pointe. La muraille de Pombie, les splendides parois sud et sud-est, les couloirs Pombie-Suzon et Pombie-Peyreget ont fait de la pointe Jean Santé un des plus haut lieu du pyrénéisme de difficulté.

Cet hiver, lors d'une conversation avec mon ami agenais Silvio Trévisan, nous évoquons la sud-est de la Jean Santé. Je lui parle de Louis Franchéo qui participa le 30 août 1953 (avec M. Bernos, M. Cazenave et M. Jolly) à la 3ème ascension de la voie originale (TD V+) ouverte les 7 et 8 mai 1953 par A. Armengaud et Jean Ravier. Et Silvio, me disant qu'il est encore viviant et qu'il le connait, de me proposer de le rencontrer, Louis habitant au nord du Lot et Garonne, à une heure de route d'Agen. Rendez-vous fut pris, et c'est ainsi qu'à Pâques, avec Silvio, nous sommes allés rendre visite à Louis Franchéo.

Visiblement heureux que l'on vienne l'interroger et l'écouter sur une période de sa vie ou il fréquenta les plus grands pyrénéistes (et même alpinistes), l'homme, malgré ses 87 printemps, n'en garde pas moins une grande précision dans ses souvenirs. Et avec une verve certaine, l'après midi se déroulant dans ce coin de campagne à l'extrémité nord du département, nous avons écouté Louis Franchéo nous faire part du souvenir de ses escalades pyrénéennes ou alpines, en évoquant des figures connues : André Brives (son parrain d'escalade), Beroy (Marcel Jolly)... et les moyens d'époque de l'escalade artificielle (! no comment !).
S'interrompant un moment, Louis m'entraina dans son atelier (ou il réalise de magnifiques vitraux peints), et ouvrit une superbe boîte de sa fabrication, incrustée d'une multitude de cristaux translucides. Elle en renfermait d'autres, plus gros et bien plus beaux encore, d'une pureté absolue. Lorsque Louis me demanda si j'avais une idée d'ou ils provenaient, je lui répondit que je n'en savais rien. Alors, je lui ai laissé le plaisir de m'apprendre (je m'en doutais un peu quand même) que ces joyaux de verre étaient en fait du quartz, et qu'il les avait arraché -marteau aidant avec délicatesse - à la paroi lors de son parcours de la sud-est à la pointe Jean Santé. Raison de plus pour y aller...

Vendredi 28 août 2009, 21h30

Nous quittons les alentours du col du Pourtalet. Il fait nuit, et de plus un épais brouillard a envahit les lieux. La visibilité ne dépasse pas le faisceau de nos lampes. Qu'importe, nous partons sans inquiétude, traversons le torrent et trouvons le chemin connu montant en lacets au col du soum de Pombie. Ce faisant, nous croisons trois espagnols casqués, rentrant de la voie normale, qui nous informent qu'il faut trois heures pour relier le refuge. Mais bien sûr... Nos sacs bien fermés ne laissant rien deviner de nos intentions, on a Cyril et moi l'impression qu'ils nous prennent pour des neu-neu. M'enfin, 1h après avoir quitté le macadam, nous plantons rapidement et discrètement la tente sur l'aire de bivouac proche du refuge, puis nous endormons le plus vite possible.

Samedi 29 août 2009, 7h30

Dring, à 8h15, après avoir salué Karine au refuge, nous quittons les vertes pelouses pour remonter la Grande Raillère. A 9h, nous sommes au pied de la voie des Vires. En nous harnachant, je me rends compte que les dégaines sont restées dans le coffre. Tant pis, on fera sans. 9h40, nous commençons à monter sur la première vire, et parvenu sur la terrasse herbeuse, sous le couloir Pombie-Peyreget (souvent utilisé comme itinéraire de descente de la pointe en rappel), je consulte mon guide Ollivier. Je voulais au départ gagner la Jean Santé par la voie des Vires, puis la pointe d'Aragon par le couloir Sanchette avant de suivre l'arête jusqu'au sommet. Mais là, changement de programme, je décide Cyril à me suivre pour gravir le couloir Pombie-Peyreget (itinéraire 214 du guide Ollivier Aspe-Ossau, ou 79 du guide Dupouey).
Quittant les Vires, nous franchissons (L1) sur la gauche un court ressaut (III+) et suivons une banquette herbeuse incliné allant en se redressant jusqu'à la base du couloir (II). Guide Ollivier en main, je pense suivre l'itinéraire indiqué. Je m'engage aussitôt plein axe, dans une cheminée rébarbative, dans laquelle je bataille ferme. Au bout d'un (long) moment, Cyril me suggère d'ouvrir le guide. Après consultation, redescente. 1h de perdue. Je m'élève alors plus sur la droite dans une fissure, avant de surmonter un dièdre court mais déversant (1 piton en place à sa base) en posant friends et coinceurs (IV). Au dessus, une autre fissure fait suite, je l'escalade (III+) avant de rejoindre une dalle déversée sur le vide. Je la traverse sur la droite (II, 1 piton en place) sur une dizaine de mètres avant de remonter légèrement (R2). Cyril ne tarde pas à suivre. Au delà, par un cheminement plus facile (III), en contournant sur la gauche un bloc monumental, nous reprenons pied dans le couloir (L3).

L'endroit est austère, dominé par un surplomb impressionnant. Relais sur la gauche du couloir (R3). Je le traverse avant de m'élèver sur un court mur vertical (IV). Il donne accès à une petite vire déversée, surplombée par des blocs. La progression n'est pas difficile, mais exposée. Protection sur friends. Je suis la vire, franchit une nervure qui me permet de gagner une seconde vire. Un peu plus large, je la remonte (un piton en place), puis rejoint une terrasse d'éboulis sur laquelle j'installe le relais (R4). D'ici, la vue est des plus impressionnante sur les parois de la pointe qui plongent directement sur la Grande Raillère.
Cyril passe devant (III) et s'élève sur la gauche jusqu'au pied d'un grand bloc. Malgré le guide, il ne sait pas trop ou aller. Je l'y rejoint (R5). Après consultation détaillée, je continue toujours sur la gauche et arrive au pied d'une fissure dominée par une lame rocheuse (1 piton à la base). Je surmonte tant bien que mal cette fissure suivie d'un dièdre (IV malcommode), mon plus gros friend (le n°3) y nageant royalement (faudrait peut être s'équiper d'un n°4). Au dessus, quelques blocs faciles suivent, j'installe un relais sur sangle (R6). Quand Cyril me rejoint, je regagne sans difficulté le fond du couloir (II). Relais sur bloc à nouveau (juste au dessous, il y a un des relais équipé pour redescendre en rappel). La brèche Jean Santé est en vue, Cyril la gagne par une pente d'herbe et de rocaille (II).

En y parvenant, c'est une vue saisissante qui s'offre soudainement à nous sur les abîmes du couloir Pombie-Suzon. En corde tendue, nous finissons l'ascension (II) de la pointe Jean Santé.

Et c'est avec une joie teintée d'une émotion bien particulière que nous parvenons au sommet de cette dernière.

Près du cairn sommital, je découvre la plaque déposée par le GPHM à la mémoire de Jean Santé, qui fût le premier à en fouler la cime le 4 septembre 1927. Il utilisa pour y parvenir, aidé par Charles Fraisse et Roger Cazabonne, un rappel depuis le sommet de la pointe d'Aragon. La plaque commémorative, bien que fendue en deux, délivre toujours son message de souvenir :

A

JEAN SANTE
MORT AU CHAMP

D'HONNEUR

LE 25 JUIN 1940

LE GROUPE

PYRENEISTE DE

HAUTE MONTAGNE

Repas, séance photo (le guide Ollivier avec le Dupouey et Passages Pyrénéens - rien que ça, dès fois qu'on aurait eu du mal à trouver le sommet - à coté de la plaque, composition d'altitude), tandis qu'à l'aplomb du sommet, des cordées sortent des voies sud-est. L'impression produite, avec les éboulis concentriques de la Grande Raillère, les paturages, le lac et le refuge de Pombie, est des plus spectaculaire. En toile de fonds, les grands sommets pyrénéens (Telara, Enfer, Frondella, Balaïtous, Fache, Vignemale, Pallas...) complétent la vue et lui donnent une dimension de tout premier ordre (comme quoi il n'y a pas qu'à 3000m que...).

Au sommet, brillant sous le soleil, je trouve beaucoup de petit blocs renfermant des cristaux, et je ne peux m'empêcher d'en glisser quelques uns au fond du sac. Même s'ils sont bien moins purs que ceux que m'a montré Louis Franchéo, ils feront toujours un heureux souvenir.
15h30, même si la journée est magnifique, c'est un peu tard pour rejoindre la pointe d'Aragon puis le grand pic. A regret, nous quittons cette pointe pour revenir à la brèche Jean Santé.

Nous redescendons le haut du couloir Pombie-Peyreget avant d'entamer la descente intégrale de ce dernier par une série de grands rappels (tous les relais sont équipés).

Retour sur les vires puis au pied de la paroi avant de redescendre les blocs et éboulis de la raillère. 21h30, à la nuit tombante, nous repassons au refuge avant d'aller préparer la popote et de se coucher.
Demain sera un autre jour...
celui du Petit Pic (à suivre...).

  Dimanche 19 mars 2023 Pyrénées, d'un 3000 à l'autre , 3e édition, vient de paraître ! Jamais deux sans trois... Les éditions MonHé...